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Site sur la nature, l'environnement, l'écologie. à l'échelle locale (Haute-Loire, Parc Naturel Régional du Livradois Forez, Auvergne), nationale (France) et globale (planète Terre).

Que penser du nucléaire ?


En France, l’électricité provient majoritairement de centrales nucléaires (>> L’énergie dans le monde). La proportion du nucléaire dans le « mix énergétique » est variable, on peut connaître les données sur le site de RTE. Par exemple,

  • 78% le 3 février 2023 à 5h15 (44.358 MW)
  • 54% le 23 janvier 2023 à 10h15 (41.952 MW)
Nucléaire

Pour ses détracteurs, le nucléaire est source de tous les dangers. Il suffit de penser à l’accident de Tchernobyl, dont les poussières radioactives rendent, encore aujourd’hui en France, certains champignons impropres à la consommation (>> La toxicité des champignons). Il y a aussi le délicat problème de la gestion des déchets nucléaires. On peut aussi s »inquiéter face aux risques si un missile russe tombe sur une grande centrale ukrainienne. Ou si la submersion marine atteignait une centrale côtière dans le Nord de la France…

On peut également évoquer le fait que l’uranium exploité en France provient de mines situées au Canada, au Kazakhstan et dans une zone désertique du Niger. D’autres zones sont prospectées, en Ouzbékistan par exemple.

Mais pour les partisans du nucléaire, il s’agit d’une énergie décarbonée « bonne pour le climat » (>> Un climat déréglé ? ; L’effet de serre).

Qu’en penser ?

L’extraction de l’uranium

Commençons par le début… Pour produire de l’électricité, un réacteur nucléaire a besoin d’un combustible fissile fabriqué à partir d’uranium. Il existe plusieurs méthodes pour l’extraire, dépendant notamment de la richesse en uranium des minerais, variable selon les pays. Intéressons-nous à ce qui ce passe au Kazakhstan.

Le Kazakhstan

De par l’importance de ses réserves de pétrole, de charbon et d’uranium, le Kazakhstan joue un rôle non négligeable sur le marché de ces matières premières stratégiques. Ce pays d’Asie est le neuvième plus grand pays du monde par sa superficie. Depuis son indépendance en 1991, son développement est lié à sa capacité d’attirer les investisseurs étrangers. Quelques chiffres concernant l’uranium (source) :

  • Le Kazakhstan occupe la position de leader mondial avec environ 40% de la production mondiale en 2017 (23.391 Tonnes).
  • Ce pays possède les deuxièmes plus importantes réserves mondiales (estimées à environ un milliard de tonnes).
  • L’entreprise publique kazakhe qui produit l’uranium exploite, avec ses filiales et multinationales partenaires, 26 bassins regroupés en 13 centres de traitement.

Je ne vais pas m’intéresser ici aux enjeux géopolitiques des accords passés entre la France et ce pays situé entre les géants Russe et Chinois. La question est de savoir quels sont les impacts écologiques de l’extraction de l’uranium. Ce que l’on peut affirmer :

  • Les mines se trouvent au milieu des steppes kazakhes.
  • Ces steppes représentent une des plus grandes régions de steppe sèche de la planète, couvrant environ 804.500 km2 (environ 59% du Kazakhstan ; par comparaison, la superficie de la France métropolitaine est d’environ 544.000 km2). Elles s’étendent sur plus de 2.200 km du nord de la mer Caspienne à l’est jusqu’aux montagnes de l’Altaï. On y distingue cinq zones écologiques différentes : steppe forestière, steppe de prairie, steppe sèche, steppe désertifiée et steppe semi-désertique (document pour en savoir plus). C’est notamment l’habitat de l’antilope Saïga, une espèce en danger critique d’extinction (mieux la connaître sur le site du wwf).

Une extraction sans danger ?

Les mines kazakhes (et françaises au Kazakhstan) utilisent la technologie de récupération in situ (In Situ-Recovery – ISR). Il s’agit d’extraire l’uranium de roches à faible teneur de façon économique.

D’après le groupe français spécialisé dans le combustible nucléaire, ce procédé est écologique. En effet, nul besoin de creuser, cela limite donc les poussières polluantes. L’industriel injecte une solution acide dans le gisement par des puits. Cette solution dissout l’uranium, puis elle est pompée jusqu’à la surface et acheminée jusqu’à l’usine où l’uranium est extrait. Le liquide résiduel enrichi en acide est réinjecté dans les puits. Il s’agit d’un circuit fermé, donc non polluant selon l’exploitant. Mais…

Selon le réseau Sortir du Nucléaire, l’extraction de l’uranium laisse en réalité d’abondants déchets radioactifs et épuise rapidement les sols. Il faut alors forer un peu plus loin. Surtout, les roches n’étant pas étanches, ce procédé laisse des concentrations toxiques de métaux lourds dans les nappes phréatiques. La fédération d’associations anti-nucléaires affirme que cette pollution persistera pendant des milliers d’années, la faune et la flore des steppes sont contaminées, et l’avenir des quelques populations nomades qui vivent encore dans ces régions est menacé. Précisant qu’aux États-Unis, les entreprises qui utilisent la même méthode ont essayé sans succès pendant des années de ramener les eaux souterraines dans leur état initial avant l’exploitation minière. De même à Königstein en Allemagne, les effluents hautement contaminés résiduels présentent un risque non négligeable pour l’aquifère qui alimente la région en eau potable.

Donc l’extraction… assurément polluante, elle doit aussi nécessiter de l’énergie. Selon son origine, elle peut elle aussi être polluante et contribuer à l’effet de serre… Visiblement, l’extraction atteint au minimum les sols, l’eau et la biodiversité.

Acheminement de l’uranium

Deuxième étape, l’uranium doit arriver dans des usines où il devra être traité. Les transports de l’uranium du Kazakhstan vers la France sont bien sûr tenus secrets et ne sont pas sans danger.

En 2017, chaque mois, les conteneurs commençaient par parcourir environ 4.000 km de rails à travers le Kazakhstan et la Russie. Une fois à Saint-Pétersbourg, ils étaient chargés sur un bateau à destination de Hambourg. Enfin, ils étaient à nouveau transportés sur 1.600 km de rails en Allemagne puis en France via Metz, Dijon, Valence et Montpellier (source).

Fin 2022. Le groupe français spécialiste du nucléaire et l’entreprise Kazakhe signent un accord pour produire davantage d’uranium, donc en acheminer davantage vers la France. Avec la guerre en Ukraine et les « tensions » avec la Russie, les autorités ont-elles changé le parcours ?

Traitements de l’uranium en France

Malvési (Aude)

L’uranium arrive en France sous forme de poudre jaune. Il doit être purifié et transformé en combustible nucléaire dans l’usine Malvési, dans la banlieue de Narbonne (Aude). Cette installation purifie un quart du minerai d’uranium naturel mondial (500.000 T) depuis son implantation, en 1959. On y dissout le concentré minier avec de l’acide nitrique. En 60 ans, plus de 300.000 m3 de déchets radioactifs ont été produits et sont contenus dans des bassins, sous forme de boue. Les riverains s’inquiètent de l’important niveau d’uranium et du taux de réactivité aux alentours de l’usine. Le directeur du site affirme pourtant qu’il n’y a aucun danger pour les habitants… (source).

Tricastin (Drôme)

Le produit obtenu part ensuite sur le site de Tricastin dans la Drôme pour y être enrichi. Ce site comprend également une des plus anciennes centrales nucléaires de France avec des réacteurs mis en service en 1980. Enfin, des ateliers permettent le traitement des déchets : défluoration de l’hexafluorure d’uranium appauvri, dénitration du nitrate d’uranyle… Petit aperçu de ce site sur la photographie ci-dessous. Le cours d’eau qu’on voit devant le site industriel est une partie canalisée du Rhône.

Nucléaire : le site de Tricastin

Bien sûr, officiellement, personne ne court aucun risque, la centrale et les ateliers de traitement sont parfaitement sécurisés, etc. Néanmoins, bien des voix s’inquiètent des dangers potentiels des réacteurs vieillissants, dont on diffère régulièrement « l’âge de départ à la retraite ». En 2021, Greenpeace publiait une modélisation de la dispersion de la radioactivité en cas d’accident majeur sur la centrale, évoquant les 20 fissures de l’une des cuves, des risques de séismes, inondations, sécheresses, rupture du canal de Donzère-Mondragon en amont du Rhône… (source).

La production d’électricité

Voici ce qu’on peut lire sur le site d’EDF. Avec une production de 2.710 TWh en 2018 (soit 10,1 % de la production mondiale d’électricité), le nucléaire est la troisième source de production d’électricité dans le monde. Fin 2019, 443 réacteurs nucléaires étaient en fonctionnement, répartis dans 30 pays. La France compte 56 réacteurs, permettant à la filière nucléaire de produire jusqu’à trois quarts des besoins en électricité du pays. Mais…

Une production en baisse

16 février 2023. RTE, gestionnaire des réseaux électriques, publie le bilan concernant la production et la consommation d’électricité en 2022. On y lit qu’en 2022, la production totale en France recule de 15% par rapport à 2021. Avec 279 TWh produits (soit 63% de la production totale en France), la production nucléaire affiche un recul de 30% par rapport à la moyenne de ces vingt dernières années. Elle est la plus faible depuis 1988. Avec, en plus, une diminution de la production hydroélectrique du fait de la sécheresse, la France a dû, pour la première fois depuis 1980, importer plus d’électricité qu’elle n’en a exporté (bilan net de 16,5 TWh en import, 60% sur les mois de juillet, août, septembre).

Des réacteurs à l’arrêt

été 2022. Sur les 56 réacteurs du parc nucléaire français, 27 étaient à l’arrêt, entre les visites décennales, les arrêts pour rechargement du combustible, et les travaux de maintenance face aux problèmes de corrosion.

Mois après mois, les actualités traitent toujours des problèmes de fissures découverts dans les centrales nucléaires. Intéressons-nous à quelques incidents présentés sur le site de l’autorité de sureté nucléaire.

Niveau 1 : anomalies

Les incidents de niveau 1, « anomalies », sont relativement fréquents.

Les réacteurs nucléaires contiennent de nombreux tuyaux, en particulier ceux impliqués dans le refroidissement des centrales. Lors des visites décennales des réacteurs, des spécialistes les contrôlent par ultrasons. Une attention particulière est portée au niveau des soudures des coudes des tuyauteries d’injection de sécurité du circuit primaire principal : ces zones sont soumises à d’importantes contraintes.

Début 2023, on a ainsi repéré des fissures de fatigue thermique, sur des lignes considérées comme sensibles à la corrosion sous contrainte, au niveau du réacteur 2 de la centrale nucléaire de Penly (Seine-Maritime) et du réacteur 3 de la centrale nucléaire de Cattenom (Moselle). L’ASN a classé ces événements au niveau 1 : « anomalies ».

Autre exemple, qui n’a heureusement pas eu de conséquence. Le 14 juin 2024, EDF a dû signaler une erreur de calcul du débit minimal attendu au niveau de circuits de refroidissement, pour les vingt réacteurs de 1300 MWe : étaient concernées les centrales nucléaires de Belleville-sur-Loire, Cattenom, Flamanville, Golfech, Nogent-sur-Seine, Paluel, Penly et Saint-Alban.

Niveau 2 : incidents

Début 2023 on détecte une fissure située à proximité d’une soudure d’une ligne située en branche chaude du système d’injection du réacteur 1 de la centrale de Penly (Seine-Maritime). La fissure s’étend sur 15,5 cm, soit environ le quart de la circonférence de la tuyauterie, et sa profondeur maximale est de 2,3 cm, pour une épaisseur de tuyauterie de 2,7 cm. Cette ligne était considérée par EDF comme non sensible à la fissuration par corrosion sous contrainte… Cet évènement n’a pas eu de conséquence sur le personnel ni sur l’environnement, mais il affecte la sécurité, puisqu’il concerne le refroidissement du réacteur. En raison de ses conséquences potentielles et de l’augmentation de probabilité d’une rupture, l’ASN le classe au niveau 2 : « incident ».

Plus récemment. Le 6 juin 2024, un intervenant était rentré dans le bâtiment du réacteur 4 du Tricastin, à l’arrêt pour maintenance et rechargement en combustible. On réalise un contrôle systématique des doses reçues par les ouvriers quand ils sortent. On a ainsi pu constater une contamination du pied du travailleur. Les limites réglementaires annuelles de doses sont, pour douze mois consécutifs, de 20 milliSieverts pour le corps entier et de 500 milliSieverts pour une surface de 1 cm² de peau. La médecine du travail a estimé qu’il a reçu une dose supérieure à la limite annuelle réglementaire au niveau du pied. L’incident a donc été signalé et évalué à un niveau 2. On ne connaît pas l’origine de cette contamination.

Niveau 3 : incidents graves

Les incidents graves, de niveau 3, sont heureusement rares. En France, mentionnons l’irradiation par une source de cobalt 60 d’un travailleur intervenant dans un bunker d’irradiation sur le site de l’ONERA de Toulouse en 2008. Mais aussi, en 2002, le transport d’un colis dont la radioactivité dépassait les normes, entre la Suède et les États-Unis via l’aéroport de Roissy. Ou encore, en 1981, l’incendie d’un silo de stockage à La Hague.

Niveau 4 : Accident ayant des conséquences locales

Deux accidents sont survenus en France en 1969 et 1980 dans les anciens réacteurs A1 et A2, aujourd’hui à l’arrêt, de la centrale nucléaire de Saint-Laurent-des-Eaux (Loir-et-Cher).

Le 17 octobre 1969, il s’agit d’une erreur lors du rechargement du cœur du réacteur A1, provoquant la fusion de 5 éléments combustibles (qui n’étaient pas encore irradiés). L’accident a conduit au rejet d’une faible quantité d’effluents radioactifs gazeux.

Le 13 mars 1980, l’accident est dû à la corrosion : les attaches d’une tôle se sont rompues, la tôle entraînée dans le circuit a obturé des canaux à l’intérieur du réacteur A2 en plein fonctionnement… Conséquence : fusion de 2 éléments combustibles (environ 20 kg d’uranium) chargés environ deux ans auparavant, traces de fusion sur deux autres éléments. Le niveau de réactivité augmentant dans le réacteur, il a été mis à l’arrêt le temps de procéder aux opérations de nettoyage. En raison de l’âge du combustible ayant fondu, les rejets d’effluents radioactifs gazeux ont été plus importants qu’en 1969.

Niveau 5 : accident ayant des conséquences étendues

On n’a heureusement jamais connu d’accident de niveau 5 en France. Dans le monde, relatons la fusion partielle du cœur du réacteur à Three Mile Island aux États-Unis, en 1979.

Niveau 6 : accident grave, et 7 : accident majeur

En 1957, l’explosion d’une cuve de produits radioactifs à l’usine de retraitement de Kyshtym en URSS est un accident grave.

Les accidents majeurs sont l’explosion du réacteur 4 de la centrale nucléaire de Tchernobyl en Ukraine en 1986, et l’accident de 3 réacteurs à Fukushima en 2011. Les rejets radioactifs gazeux estimés s’élèvent à une centaine de milliers de Térabecquerels pour Fukushima, et environ un million de térabecquerels pour Tchernobyl.

Je pourrais poursuivre ainsi, côté risques, avec le devenir des réacteurs le jour où ils seront fermés, le devenir des déchets radioactifs… Mais voyons plutôt le côté positif affiché par les tenants de l’énergie nucléaire : Certes, le nucléaire peut tuer en cas d’accident, et polluer les milieux pour des durées très longues, mais cette énergie décarbonée serait une solution face au dérèglement climatique.

L’énergie nucléaire, une solution pour le climat ?

Bilan carbone

Une centrale à charbon produit de l’électricité en brûlant un combustible fossile. Cela libère le dioxyde de carbone qui y avait été piégé il y a des millions d’années. Ce gaz à effet de serre contribue au dérèglement climatique.

Rien de tel dans un réacteur nucléaire. On y utilise un combustible fissile dont la radioactivité dégage de l’énergie transformée en électricité. Donc ça ne déséquilibre nullement le bilan carbone, on peut ainsi affirmer que le nucléaire est vertueux en matière climatique.

Est-ce aussi simple ?

Si on veut réellement faire le bilan carbone de la production d’électricité par les centrales nucléaires, il faut regarder l’ensemble de la filière, depuis la construction des centrales jusqu’à leur démantèlement, de l’extraction de l’uranium jusqu’au traitement des déchets. D’après les calculs des experts, deux chiffres sont avancés (source) :

  • 12 g CO2/kWh d’après le GIEC
  • 6 g CO2/kWh d’après l’ADEME

RTE utilise les valeurs suivantes pour évaluer en temps réel la contribution de chaque filière de production aux émissions de dioxyde de carbone :

  • 986 g CO2 /kWh pour les centrales à charbon,
  • 777 g CO2/kWh pour les centrales à fioul,
  • 494 g CO2 /kWh pour les bioénergies (déchets),
  • 429 g CO2 /kWh pour le gaz,
  • et 0 pour toute les autres filières : nucléaire, hydroélectricité, solaire…

Assurément, ce n’est pas 0 pour le nucléaire, mais c’est négligeable en comparaison des centrales brûlant des combustibles fossiles.

Le besoin en eau

Un réacteur nucléaire produit de l’électricité à partir de la chaleur dégagée par la réaction en chaîne qui a lieu dans son cœur. L’installation doit être refroidie en permanence pour fonctionner en toute sécurité. Il existe deux systèmes possibles :

  • De nombreux réacteurs prélèvent de l’eau « froide » dans un cours d’eau ou la mer (40 m3 d’eau par seconde pour une centrale de 900 MW) puis en rejette 97%, légèrement réchauffée (source).
  • Sur les 56 réacteurs français, 30 ont un système avec des tours aéroréfrigérante, qui permettent de refroidir la centrale et d’évacuer la chaleur par la vapeur d’eau. Ce système a l’avantage de pomper moins d’eau, mais en restitue moins puisqu’une partie part dans l’atmosphère. 
La question de la vapeur d’eau

Les centrales peuvent donc dégager de la vapeur d’eau. C’est tout à fait naturel, ça ne pollue pas, tout va bien… Euh… savez-vous quel est le premier gaz à effet de serre ? Le dioxyde de carbone ? non. Certes, le dégagement de ce gaz par les activités anthropiques joue un rôle majeur dans l’augmentation de l’effet de serre. Mais si la température moyenne de notre planète est d’environ +15°C et non -18°C, ce n’est pas grâce au dioxyde de carbone.

  • La vapeur d’eau est l’élément de l’atmosphère contribuant le plus à l’effet de serre NATUREL car elle absorbe largement les infra-rouges.
  • Son contenu maximum est contrôlé par la température de l’air. Plus il fait chaud, et plus l’air peut se charger en humidité… et plus l’effet de serre augmente, donc il fait plus chaud, davantage d’eau s’évapore…
  • Mais contrairement aux autres gaz à effet de serre, la vapeur d’eau ne demeure que brièvement dans l’atmosphère. Après « quelques jours », elle condense en gouttelettes d’eau ou en particules de glace et précipite à la surface du globe.
  • Les activités humaines peuvent influencer l’abondance de vapeur d’eau dans l’atmosphère par des changements d’occupation des sols qui modifient l’évaporation, par exemple l’irrigation augmente l’évaporation. De même, de la vapeur d’eau est dégagée d’installations industrielles comme les centrales nucléaires.

Cela dit, la quantité de vapeur d’eau dégagée par les centrales nucléaires paraît négligeable par rapport à celle issue naturellement de la surface des océans.

Donc quel que soit le gaz à effet de serre, réellement, l’industrie du nucléaire en dégage suffisamment peu pour qu’on puisse considérer que c’est négligeable. Cela dit, est-ce suffisant pour affirmer que le nucléaire est vertueux en ce qui concerne le climat ?

des rivières plus chaudes

été 2022. Plusieurs épisodes de canicules et une forte sécheresse. Les rivières sont au plus bas. Cinq centrales nucléaires ont bénéficié de dérogations environnementales du 6 août au 11 septembre. Au Bugey (Ain), au Blayais (Gironde), à Saint-Alban (Isère), au Tricastin (Drôme) et à Golfech (Tarn-et-Garonne), elles ont le droit de rejeter de l’eau « trop chaude » dans la rivière pour pouvoir continuer à refroidir les réacteurs, même si au-delà de certains seuils, la faune aquatique risque de mourir… (source).

Pour Tricatin par exemple, la limite de température de l’eau en aval de la centrale est de 28 voire 29°C (source) et, en 2022, une dérogation autorisait à dépasser les seuils fixés… Est-ce vraiment très élevé pour un poisson ?

Tous les poissons n’ont pas les mêmes exigences concernant la température de leur milieu de vie. La truite, par exemple, est un poisson qui vit dans des eaux fraîches, bien oxygénées. Selon les sites, on peut lire qu’au delà de 20 / 22 / 25°, la température est trop chaude pour sa survie. C’est clair que dans le canal ou le Rhône canalisé près de Tricastin, on ne risque pas d’en voir ! On a observé les préférences de poissons dans le Rhône : À la différence du silure, les cyprinidés (barbeau et chevaine) semblent éviter les zones où la température dépasse 25°C. Donc oui, dépasser 28/29°C, c’est chaud !

La température de l’eau agit directement (la température corporelle des poissons dépend de celle de leur milieu) et indirectement (il y a d’autant moins de dioxygène dissout que l’eau est plus chaude). A 2°C, l’eau peut dissoudre 14 mg de dioxygène par litre. 11 mg/L à 10°C, 9 mg/L à 18°C, et seulement 7 mg/L à 30°C… (graphique).

température du Rhône

On connaît l’évolution de la température du Rhône, de 1920 à 2010 : On note une augmentation d’environ 2°C en moyenne. La part d’échauffement lié aux rejets thermiques des centrales nucléaires varie en cours d’année, elle représente en moyenne la moitié de l’échauffement. Par exemple à Bugey, la moitié du temps les échauffements dus aux rejets des centrales sont inférieurs à 1,5°C. Mais 3 jours par an, ils peuvent atteindre 6°C. En période chaude, si on compare l’évolution de la température entre 1977-1987 et 1988-2010, on note une augmentation de la température de 3,6° du Rhône à Aramon (Gard) : 1,6°C est dû à la centrale. Quelles valeurs désormais ?

Conséquence, ce ne sont plus les mêmes poissons qui vivent dans le Rhône. Depuis les années 2000, on constate une augmentation graduelle de la part des espèces d’eaux chaudes et lentes, dont certaines nouvellement arrivées tel que le silure, aux détriments d’espèces d’eaux froides et courantes comme la vandoise, autrefois caractéristique du Rhône.

Donc certes, les centrales nucléaires ne modifient pas directement le climat global, mais elles provoquent un réchauffement des cours d’eau et, de ce fait, agissent sur la biodiversité. Localement, l’impact thermique peut être important. Par exemple on observe une hétérogénéité thermique locale très nette entre la rive du rejet et la rive opposée, de l’ordre de 5°C à Bugey. La zone soumise à l’échauffement peut atteindre une dizaine de kilomètres à Bugey. A échelle de poisson et autres habitants du fleuve, ce n’est pas rien ! (source)

Et… le climat permet-il la poursuite du nucléaire ?

Là est aussi une question importante…

2 février 2023. France-Bleu Vaucluse a demandé à Jean Revest, du collectif anti-nucléaire de Vaucluse son avis sur l’avenir du site du Tricastin :

  • EDF désire prolonger la centrale jusqu’à 60 ou 80 ans. Or les réacteurs, vétustes et délabrés, ont été conçus pour au maximum 40 ans, âge qu’ils ont dores et déjà dépassé. En France, bien des réacteurs étaient à l’arrêt en 2022 pour corrosion notamment (par exemple, 21 réacteurs nucléaires sur 56 en activité étaient à l’arrêt en France, au 29 décembre 2022).
  • Il est aussi question d’agrandir l’usine d’enrichissement de l’uranium à l’horizon 2028. Pour Jean Revest, il s’agit essentiellement de « business » pour exporter davantage, et réduire la dépendance à l’uranium enrichi russe, dans l’actuel contexte de guerre en Ukraine.

Jean Revest précise que l’ensemble du site du Tricastin a été construit dans les pires conditions imaginables : en zone sismique et inondable. Mais surtout, le GIEC prédit une baisse de 40% de l’eau dans le Rhône. Or, pour fonctionner, un réacteur a besoin d’eau pour son refroidissement, sinon il explose… Il évoque que même l’autorité de sûreté nucléaire affirme que, dans ces conditions, la catastrophe est inéluctable…

Pendant l’été 2022, avec la sécheresse et la canicule, le niveau des cours d’eau a baissé. Partout, des mesures de restriction d’eau ont été prises. Face aux différents usages de l’eau, que va-t-on privilégier : continuer à avoir de l’eau potable ? permettre aux éleveurs d’avoir de l’eau pour leurs animaux ? permettre aux poissons de vivre dans leurs rivières ? ou produire de l’électricité dans les centrales ? …

2024 est marqué par des inondations, des risques de submersion au niveau des côtes. L’excès d’eau n’est pas, non plus, sans danger pour les centrales.

Qu’en pensez-vous ?

Pour agir en faveur du climat, on doit éviter les combustibles fossiles. Les centrales hydroélectriques ? Elles posent aussi des problèmes environnementaux et ne peuvent fonctionner en cas de pénurie d’eau. Pour agir, diminuer la consommation d’électricité permet simultanément de baisser ses charges et d’abaisser la pression qu’on exerce sur les milieux. D’autres avantages sont aussi possibles, par exemple l’extinction de l’éclairage public en milieu de nuit restaure l’obscurité de la nuit…