Le permafrost, c’est quoi ?
Dans le Grand Nord, en Haute Montagne, le sol reste gelé en permanence. On parle de permafrost = pergélisol pour désigner ces sols dont la température se maintient en dessous de 0°C pendant plus de deux ans consécutifs.
Ce permafrost est recouvert par une couche de terre, la couche active, qui dégèle en été et qui permet le développement de la végétation.
Le réchauffement climatique
Les températures augmentent…
- 38°C en Sibérie, à 67° de latitude Nord, au delà du cercle polaire, en juin 2020. Presque 50°C au Canada pendant l’été 2021.
- En altitude, on a franchi la barre des 10° en juin 2022 au sommet du Mont Blanc. En 2024, c’est la première fois depuis le début des observations en 1894 qu’il faut attendre début novembre pour voir la neige sur le Mont Fuji au Japon.
- Côté sud, l’été austral 2018-2019 fut particulièrement chaud, plus de 30°C en Terre de Feu, plus de 40°C en Patagonie. Depuis les records se succèdent… 42,6°C à Trelew, en Patagonie Argentine, fin janvier 2024…
Cette augmentation des températures provoque le dégel non seulement de la couche active, mais aussi, de plus en plus, du permafrost. Les conséquences sont multiples.
Les conséquences du dégel du permafrost
Accélération du réchauffement
– En montagne notamment, il peut y avoir des neiges éternelles. Avec la chaleur, elles fondent, laissant la place à une surface sombre (modification de l’albedo), qui absorbe davantage le rayonnement solaire. Ces lieux se réchauffent plus vite, donc le permafrost fond plus vite…
– Chez nous, les débris végétaux, les feuilles qui tombent en automne, sont décomposés par les micro-organismes et transformés en humus. Dans les zones concernées par le permafrost, ces débris ne peuvent être correctement décomposés. Quand la température augmente, on observe une activation de la vie microbienne. Or ces micro-organismes libérant du dioxyde de carbone quand les sols sont secs, du méthane quand ils sont saturés d’eau. Ce sont des gaz à effet de serre. Donc la température augmente. Donc le permafrost fond et la vie microbienne est activée, émettant des gaz à effet de serre qui provoquent une élévation de la température, donc… Autre source de méthane : du gaz naturel s’était formé dans les sols il y a des milliers ou des millions d’années, emprisonné dans le permafrost. Avec la fonte de la couche gelée, le gaz se libère de façon explosive, laissant place à d’immenses cratères.
Impact sanitaire
– Le froid du permafrost permet une excellente conservation des micro-organismes. L’exemple le plus célèbre est la résurgence de la maladie du charbon. Dans le Nord de la Sibérie, une importante épidémie avait eu lieu en 1941. Des carcasses d’animaux ont été enterrées, avec la bactérie responsable de la maladie, Bacillus anthracis. On pensait la maladie éradiquée… jusqu’à l’été 2016. Juillet 2016. Il ne fait pas 17° mais 35°C. Avec le dégel du permafrost, les bactéries sortent de leur état de vie ralentie. Résultat : plus de 2300 rennes sont morts, des éleveurs nomades et des enfants ont été hospitalisé, un enfant est décédé.
Pour un exemple bien documenté, combien d’autres agents infectieux sont abrités dans les sols gelés ? Des virus et bactéries qui pourraient réapparaître lors de forages ou lors de la découverte d’un mammouth congelé…
Effondrements de terrains
Éboulements
– Le gel, c’est aussi ce qui maintient des sols durs. La fonte provoque aussi des effondrements de terrain et des éboulements. Ainsi l’ascension du Mont-Blanc se révèle-t-elle dangereuse en été.
Mais le pire c’est pour les habitants de la Sibérie. Yakoutsk est la ville la plus froide du monde, en 2022 elle abrite 341 221 habitants. Les immeubles y sont perchées sur des pilotis plantés dans le pergélisol. Mais avec la fonte du permafrost, les pilotis cessent d’être dans plusieurs mètres de roches gelées donc perdent leur stabilité. Certains bâtiments sont lézardés mais plusieurs se sont aussi effondré. Plusieurs centaines de constructions ont été déclarées inutilisables par les autorités. La fonte du permafrost menace aussi toutes les infrastructures, des canalisations mais aussi des oléoducs et des structures de déchets radioactifs, chimiques ou biologiques. Les risques d’accident grave sont par conséquent élevés.
Conséquences de la fonte du permafrost sur les écosystèmes
– il y a aussi des conséquences sur les cours d’eau. En effet, le sol dégèle en été et n’arrive pas à regeler correctement en hiver. Les couches solides se désagrègent, et l’eau s’écoule. Par conséquent les lacs disparaissent quand d’autres secteurs se transforment en marécages.
– Avec le changement climatique et l’augmentation de la profondeur de sol apparaît aussi un changement de végétation. Par exemple en Sibérie les arbres poussent plus au Nord, la forêt se rapproche de l’Arctique. Mais on voit aussi des forêts entières s’incliner puis tomber tels des mikados. On parle de forêts et d’arbres « ivres » : les résineux ont des racines superficielles et ne tiennent plus debout sur ce sol devenu mou.
On pourrait aisément poursuivre les conséquences, avec leur réseau de conséquences en chaîne, la plupart renforçant le dérèglement climatique et biologique.