Depuis 2015, chaque 8 octobre est « journée internationale du poulpe ». Mais que connaissez-vous de cet animal étonnant ?
Nous sommes d’accord, il s’agit d’animaux marins à l’allure très caractéristique avec leurs tentacules. Les scientifiques parlent de céphalopodes : des mollusques marins dont la tête est munie de tentacules. La famille des céphalopodes est très vaste, elle comprend de nombreux fossiles, certains sont dotés d’une coquille (les nautiles par exemple) d’autres non. C’est le cas des poulpes qui nous intéressent ici.
Le poulpe ? les poulpes !
Comme on peut le lire dans cet article de l’INPN, « la France métropolitaine abrite une douzaine d’espèces de poulpes ; une trentaine d’autres espèces existent aussi en outre-mer dans les zones marines sous juridiction française. » Un article de l’encyclopédie Larousse permet de bien faire le point sur la diversité des poulpes.
L’espèce la plus fréquente en Europe, indifféremment appelée poulpe ou pieuvre, porte le nom scientifique d’Octopus vulgaris. Octo ? Pour ses 8 « bras » ou « tentacules » portant 2 rangées de puissantes ventouses. Au centre des bras s’ouvre la bouche dont le bec corné sert à déchiqueter les proies capturées : crabes, crevettes et autres animaux marins…
Cinq sous-familles d’octopodidés
Notre pieuvre commune appartient à une grande famille, les octopodidés.
Imaginez : pour commencer, il y a cinq sous-familles, différenciés en fonction de la présence ou non d’une poche d’encre et le nombre de rangées de ventouses sur les bras. Ainsi, les 30 espèces de la sous-famille des bathypolypodinés n’ont pas de poche d’encre ; les 19 espèces de la sous-famille des élédoninés ont toutes une poche d’encre et une seule rangée de ventouses sur les bras. Notre pieuvre quant à elle appartient à la sous-famille des octopodinés, caractérisée par la présence d’une poche d’encre et deux rangées de ventouses sur chaque bras.
La diversité des octopodinés
Cette sous-famille comprend 10 genres, en particulier Octopus qui regroupe, à côté de notre pieuvre, une centaine d’espèces. Leur taille va de quelques centimètres, par exemple 9 cm pour avec les bras pour le poulpe pygmée des Caraïbes Octopus joubini, à plusieurs mètres, tel Octopus dofleini des côtes du Pacifique nord : 3 m environ pour un poids maximum de 50 kg. Notre pieuvre commune mesure quant à elle un peu plus d’un mètre. L’habitat des Octopus couvre les régions côtières et les grands fonds de tous les océans, sauf l’Arctique et l’Antarctique.
Deuxième genre de poulpes : Enteroctopus avec le poulpe géant du Pacifique (Enteroctopus dofleini) qui peut atteindre 71 kg !
Attention aux poulpes du genre Hapalochlaena : sur les 4 espèces, trois ont des morsures potentiellement mortelles ! En effet les glandes salivaires de Hapalochlaena maculosa, de Hapalochlaena lunulata et de Hapalochlaena fasciata sécrètent de puissantes toxines (maculotoxine et hépalotoxine), provoquant la paralysie des muscles respiratoires. De 10 à 20 cm avec des bras courts, leur corps porte de nombreux anneaux (parfois des bandes) cutanés de couleur bleu vif. On les rencontre dans les eaux littorales peu profondes, en Australie et dans l’archipel indonésien. Ouf ! aucun risque sur les côtes métropolitaines !
Pour mieux connaître les poulpes, mais aussi les calmars et les seiches, je vous propose de regarder l’émission C’est pas sorcier.
Une journée internationale dédiée au poulpe
Les poulpes ont souvent des aires de distribution assez étendues et, aucune espèce n’étant réellement menacée, il n’y a pas d’espèce protégée en France ou ailleurs. Alors pourquoi une journée internationale ? Pour célébrer l’animal qui parviendra peut-être à limiter l’invasion de crabes bleus ? Pour vanter son intelligence et ses extraordinaires capacités ?
Non, c’est pour sensibiliser au risque de surpêche. Car de nombreuses espèces de céphalopodes font l’objet de pêches importantes. Non seulement les poulpes, mais aussi les calmars et les seiches. Tous deux ont huit bras et deux tentacules et possèdent un reste de coquille interne appelé « os » chez la seiche et « plume » chez le calmar (ou calamar, ou encornet). 8 bras et 2 tentacules ? Si les poulpes possèdent huit bras = tentacules, seiches et calmars en ont dix : huit « petits », fonctionnant par paires, appelés bras, et deux plus longs dénommés tentacules ou fouets.
Des restrictions en Méditerranée
Les pêcheurs ont constaté la baisse des populations de poulpe sur le pourtour méditerranéen. Les scientifiques ont quant à eux donné l’alerte au début des années 2010. Ils ont demandé une interdiction totale de prélever des poulpes durant la saison estivale dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Le 6 septembre 2016, un arrêté préfectoral réglemente la pêche de loisir du poulpe : du 1er juin au 30 septembre de chaque année, la pêche maritime de loisir du poulpe (Octopus Vulgaris) est interdite à Port-Cros et dans toute l’aire marine adjacente (de La Garde à Ramatuelle), ainsi que dans le Parc des Calanques côté Bouches-du-Rhône.
La raréfaction des poulpes commence aussi à être pris en compte au sein de l’aire marine protégée de Mayotte, dans l’océan indien. (source)
Et sur la côte Atlantique ?
Le poulpe, qui avait quasiment disparu depuis les années 1970, a recommencé à prospérer dans les eaux bretonnes et, globalement, sur la côte Atlantique. Au début des années 2020, on parlait même d’invasion, de fléau ravageant coquillages et crustacés ! Homards, tourteaux, coquilles Saint-Jacques, aucune espèce n’est épargnée par l’appétit vorace des poulpes, une vraie calamité pour les pêcheurs de l’ouest de la France. En 2021, ils faisaient la une des médias.
Ils ont une valeur commerciale, et un poulpe pêché ne mange plus les coquillages. Les professionnels en ont donc pêché. Beaucoup. Il n’y avait pas de quota. Ainsi dans le Finistère, le volume de poulpes débarqués dans les ports est passé de 55 tonnes en 2020, à 1500 en 2021.
Résultat ? Le poulpe se raréfie. Or les pêcheurs ont besoin de cette ressource de pêche… C’est pourquoi, en 2023 et 2024, le comité départemental des pêches du Finistère a décidé d’interdire la pêche dans le Sud du Finistère. L’été est en effet une période cruciale pour la reproduction de cet animal à la vie courte. Les femelles meurent après leur ponte.
Mais si le poulpe est une manne financière pour les pêcheurs de Concarneau, du Guilvinec, d’Audierne et de Loctud, il constitue un concurrent pour les marins de Cornouaille qui vivent des coquillages et crustacés… Pour pêcher des coquilles Saint-Jacques aux Glénan et ailleurs, le poulpe ne doit pas envahir le secteur.
Difficile équilibre à trouver ! (source) D’où l’intérêt d’une journée internationale du poulpe. Envahisseur ou menacé de disparition ? Les deux !