-201 Ma : La crise trias jurassique a fait disparaitre, notamment, les conodontes que je vous présenterai. Mais avant cette crise majeure a eu lieu une importante extinction de masse lors d’un épisode pluvieux. Commençons par cette première catastrophe.
-234-232 Ma :
l’épisode pluvieux du Carnien
En plus des 5 crises biologiques majeurs, d’autres extinctions ont été repérées. Ainsi, une importante extinction de masse a eu lieu pendant un étage de la fin du Trias, appelé Carnien. A cette époque, il pleuvait beaucoup.
Une équipe britannique a étudié des données géochimiques des fossiles de cette époque. Elle a publié ses résultats en septembre 2020.
Les vertébrés terrestres, et particulièrement certains taxons de tétrapodes, ont connu un taux d’extinction très importants. 33 % des genres marins ont disparu. Il est difficile d’étudier les zones qui correspondent aux océans profonds de l’époque. En effet la majeure partie de la croûte océanique et des sédiments de l’époque ont disparu par subduction.
des indices de changement climatique
Mais on peut observer des indices d’un changement climatique. Par exemple dans les minéraux argileux déposés par le vent dans un site du Japon, on observe un changement qui signe une augmentation de l’humidité.
Dans un site de sédimentation en Italie, on remarque une interruption de la sédimentation. Là aussi, c’est le signe un changement climatique. On observe enfin des traces de grands bassins dans différents sites géologiques en Europe, en Argentine, au Brésil… Tous montrent que c’était une période très humide. Par exemple au Maroc, une sédimentation fluviale et lacustre a remplacé la sédimentation antérieure qui correspondaient à un milieu aride.
L’analyse des isotopes du carbone dans les sédiments carbonatés montre qu’il y avait un apport plus important de carbone vers l’atmosphère et les océans. Ce changement est caractéristique d’un réchauffement climatique. Selon les analyses des chercheurs, il y a eu une première augmentation de la température de 4°C, suivi d’un refroidissement et d’une nouvelle augmentation de température de 6°C.
Une importante activité volcanique
Cette extinction de masse a été provoquée par le volcanisme dans la province de Wrangelia à l’ouest du Canada actuel. Les éruptions ont connu un pic d’activité durant le Carnien.
La couche de basalte retrouvée à Wrangelia est épaisse de 3,5 à 6 km. Mais une partie a disparu par subduction à la fin du jurassique / début crétacé. On estime qu’au moins un million de km³ de basalte ont été émis, en partie sous l’eau et une large partie à l’air libre. Les scientifiques les datent d’une part en fonction des fossiles trouvés au dessus / en dessous, d’autre part en fonction de divers isotopes, par exemple le rapport 40Ar/39Ar.
On estime que les éruptions de Wrangellia ont provoqué l’émission d’au moins 5000 Gt de C. D’où effet de serre, sans doute eu aussi relargage de méthane depuis les fonds océaniques, augmentation de l’effet de serre, augmentation de la température et de l’humidité, acidification des océans, anoxie… Et perturbation des écosystèmes aquatiques mais aussi terrestres.
Après la crise, une diversification de la biodiversité
Cet épisode, pas encore bien connu, a longtemps été négligé. Mais les paléontologues considèrent désormais qu’il est important pour expliquer la diversification explosive des groupes clés d’animaux et végétaux qui a suivi.
En effet, l’extinction de masse a vu disparaître de nombreuses espèces. Mais aussi elle a fait de la place et a permis l’émergence et l’expansion d’autres. Les forêts ont changé, avec la diversification et la multiplication des conifères. Les dinosaures, qui existaient déjà depuis 20 millions d’années, ont alors prospéré, tout comme les reptiles et les premiers mammifères. Sous l’océan, les coraux durs (les scléractiniaires) et les premières espèces de plancton modernes sont apparus.
-201,58 Ma : La crise Trias Jurassique
La vie était en train de se diversifier après l’épisode pluvieux dont nous venons de parler. Divers organismes bâtisseurs de récifs s’implantaient dans les océans et les terres se sont couvertes d’une végétation luxuriante, préparant le terrain pour les archosaures. Ces animaux sont les prédécesseurs des oiseaux, des crocodiles, des ptérosaures et des dinosaures non-aviens.
Quand survient une nouvelle crise il y a environ 201 millions d’années, provoquant l’extinction de 23 à 24 % des familles, 40 à 53 % des genres et 75 % des espèces d’êtres vivants. Ont totalement disparu les orthocères, les cératites, les conodontes et placodontes, les Aetosaures et Phytosaures ainsi que les Rausuchiens. Parmi tous ces animaux disparus, découvrons les conodontes.
Les conodontes
Les conodontes font partie des premiers animaux vertébrés connus. Ils sont apparus au précambrien, donc avant l’ère primaire. Ils disparaissent totalement au tout début du jurassique.
Dès 1856, ils ont été connus uniquement par des micro-fossiles qui ressemblent à des dents. On ne savait donc pas de quel type d’animal il pouvait s’agir, ni si ces « dents » étaient des dents ou autre chose. Ce n’est qu’au début des années 1980 que les premières preuves fossiles ont été trouvées sur le reste de l’animal.
Promissum pulchrum, un vertébré
Dans les années 1990, on a trouvé en Afrique du Sud un fossile dont les tissus mous avaient été convertis en argile, préservant même les fibres musculaires qui ont pu être observées au microscope électronique à balayage. C’est le fossile du plus grand conodonte connu, de l’espèce Promissum pulchrum. Il a vécu pendant l’Ordovicien (il y a environ 480 millions d’années). Les résultats des observations de ce fossile ont été publiés en 1995.
La présence de muscles pour faire tourner les yeux a définitivement montré que ces animaux étaient des vertébrés primitifs. Ils mesuraient de 1 à 40 centimètres de long, possédaient deux gros yeux, un corps vermiforme, une nageoire caudale à rayons, des muscles disposés en chevrons, une bouche dépourvue de mâchoire (comme les lamproies actuelles).
Les dents de Wurmiella excavata
Les scientifiques britanniques et australiens se sont intéressés aux fossiles de l’espèce Wurmiella excavata. Ils expliquaient en 2012 que, grâce à l’usure et à la forme des différentes dents, ils ont pu établir qu’elles fonctionnaient par paires, l’une en face de l’autre, exerçant des mouvements de rotation pour broyer la nourriture. La force musculaire normalement associée aux mâchoires était compensée par des dents extrêmement pointues.
Les comparaisons avec les fossiles d’autres espèces de conodontes indiquent que ce système devait être assez répandu dans le groupe, mais on ne le retrouve pas chez les autres vertébrés.
La disparition des conodontes
La disparition finale des conodontes s’est produite de façon échelonnée dans le temps en fonction des zones paléogéographiques considérés. Cette extinction se produit plus rapidement dans les zones côtières de la Néotéthys, durant la fin du Trias, que dans les océans profonds de la Panthalassa (par exemple: à Inuyama, au Japon) ou dans les bassins sédimentaires les plus isolés (par exemple: à Csővár, en Hongrie). Dans ces deux derniers types d’environnement, l’extinction se produit au début du Jurassique.
Les causes de la crise Trias Jurassique
À la fin du Trias, la planète s’est réchauffée d’environ 3 à 4 °C en raison d’un quadruplement des niveaux atmosphériques de CO2 . Cette augmentation drastique a probablement été provoquée par les énormes volumes de gaz à effet de serre provenant d’un super-volcan centre Atlantique, au centre de la Pangée, le supercontinent de l’époque.
Les vestiges de ces anciennes coulées de lave sont aujourd’hui disséminés en Amérique du Sud, dans le nord-est de l’Amérique du Nord et en Afrique de l’Ouest. Le volume de lave produit à l’époque aurait pu recouvrir les États-Unis continentaux sur 400 m d’épaisseur.
La hausse soudaine des niveaux de CO2 a provoqué l’acidification des océans du Trias, ce qui a touché les créatures marines dont la coquille était composée de carbonate de calcium. Sur terre, les vertébrés dominants étaient les crocodiliens, plus grands et nettement plus diversifiés qu’ils ne le sont aujourd’hui. Bon nombre d’entre eux se sont éteints.
Dans leur sillage sont apparus les premiers dinosaures, de petites et agiles créatures qui se sont rapidement diversifiées. On pensait que 5 météorites s’étaient écrasées simultanément sur la Terre à la limite entre le Trias et le Jurassique. Mais leur datation a permis d’écarter cette hypothèse.